Claude m'avait fait rencontrer Gaston quelque temps avant la première inauguration du viaduc de Saint-Georges le Gaultier.
Si idée de film il y eut alors, elle ne fit que nous effleurer, tant la
question de savoir par où commencer devait être inhibante.
Quel que soit l'intérêt que je portais à l'homme, la véritable
rencontre avec son œuvre se fit sans lui, à Olomouc pour être précis
(en République tchèque) où dans le cadre d'un échange avec mon artiste
favori, Lubomír Dostál, je fus auto-promu « commissaire » (n'ayons pas
peur des mots, même si toutes les œuvres présentées étaient le choix de
Toni Van den Berg) de cette première exposition Floquet en territoire
morave dont je fus au moins l'installateur, ce à quoi je pris un vif
plaisir.
Ce n'est cependant pas là que le projet cinématographique prit racine.
Le temps passa.
Beaucoup plus récemment je découvris sur une scène de proche banlieue
la pièce « Projet Floquet » d'Odile Darbelley et Michel Jacquelin qui
apportait l'éclatante démonstration de ce que Floquet était à l'art ce
que le groupe O est au sang, c'est à dire un donneur universel, qu'il
était donc traduisible, transmissible, interprétable dans tous les
arts, ce qui était du reste parfaitement conforme à tout ce qu'il
n'avait jamais cessé de faire et d'être.
Mais ce n'est pas encore à cette occasion que l'idée du film nous vint à l'esprit.
Elle nous prit par surprise.
L'invitation à participer aux 24 H ¼ de Saint-Rigomer était plus que
tentante, mais je ne voyais pas ce que je pouvais apporter à
l'événement, qui, soit dit en passant, ne m'en demandait pas tant.
Aussi, sous le fallacieux prétexte d'une quelconque utilité et pour me
donner une contenance, je proposais de venir avec un troisième œil.
Est-ce pendant les 24 h ¼ ou très peu de temps après que l'évidence de mon entreprise me sauta aux yeux ?
Je ne saurai le dire exactement, mais le processus de réquisition était
déjà en marche...d'abord résider sur place, courir la chance d'un
échange médiumnique, me livrer au regard des œuvres (qui regarde qui?)
et laisser s'opérer l'aimantation naturelle des paroles, des images,
des formes...avec au final trois fils conducteurs : d'abord le
spectacle « Projet Floquet » dont de nombreux extraits seront
revisitées dans une optique cinématographique mais dont l'épilogue
retrouvera la scène, ensuite la maison de Saint-Rigomer pensée comme un
parcours, et enfin le cheminement des 24 H ¼.
Et mon tout est un film.
Tout reste à faire, mais nous ne pourrons plus nous en empêcher.
Patrick Viret